La Tour Sombre (Stephen King)
Si vous avez passé un peu de temps de ce côté-ci de la galaxie ces dernières années, vous devez forcément avoir entendu parler d'un type appelé Stephen King. Blague à part, rares sont ceux à n'avoir jamais entendu le nom du maître incontesté du roman horrifique. Il suffit de s'y arrêter un instant pour que fusent les titres : Cujo, Christine, Simetierre, Ça, Bazaar, Dreamcatcher, Shining, autant de pépites ciselées avec un sens inné de la narration. Et pourtant, l'«opus majus» de King n'est ni dans ces romans, ni dans ses (innombrables) nouvelles, mais se niche dans une saga crépusculaire dont l'écriture s'est étalée sur près de trente ans, et qui est reliée de près ou de loin au moindre récit qu'a pu produire l'auteur. Bienvenue dans notre monument du jour : le cycle de "La Tour Sombre".
Oeuvre inclassable, dont les prémisses remontent à 1970 dans les premières heures de la carrière de King, inspiré par un poème de Robert Browing, labyrinthe (une fois de plus) inextricable de genres, d'époques, de lieux, de contextes et de situations s'étalant sur près de quatre mille pages éclatées en huit volumes (sans compter les deux volumes de concordances et les déclinaisons en comics) vendus à plus de 30 millions d'exemplaires dans quarante pays, ce véritable joyau démarre dans l'ambiance d'un western à la John Ford ou à la Sergio Leone, où on imagine sans peine Roland campé par Clint Eastwood (au contraire de cette infamie commise en 2017 où on doit subir un Idris Elba totalement perdu dans le rôle de Roland et un Matthew McConaughey scandaleusement sous-utilisé) avant de passer au récit fantastico-horrifique puis de sauter allègrement les mondes et les dimensions à l'occasion d'incursions dans notre propre monde (et dans d'autres qui en sont un reflet terni et estompé) pour enfin finir en épopée épique ou l'auteur lui-même se met en scène et joue son propre personnage dans une parenthèse hallucinée en forme de ruban de Moebius et déboucher sur la fin la plus ouverte qu'il m'ait été donné de lire (et qui a d'ailleurs causé pas mal de remous au sein de la communauté des fans de la saga).
Comme je le disais plus haut, tout lecteur familier de l'écrivain retrouvera sans peine des échos plus ou moins nets du cycle dans les nombreuses histoires du maître : que ce soit le Roi Cramoisi d'Insomnie, du grand méchant du Fléau ou des Yeux du Dragon, la créature démoniaque de Désolation, le don de Danier Torrance dans Shining, chaque récit sorti de l'imagination de Stephen King porte en lui la trace, parfois ténue certes, mais indiscutablement présente, d'un lien qui le relie à la Tour Sombre, véritable pivot des mondes entres les mondes, et point central de l'univers Kingien.
Les références musicales qui peuvent accompagner cette oeuvre cyclopéenne sont évidemment aussi diverses que variées. Ennio Morricone illustrera à merveille les pages du Pistolero, le jazz new-yorkais de Roy Haynes vous accompagnera à merveille dans Les Trois Cartes ou le Chant de Susannah, et "In the Court of the Crimson King" de King Crimson habillera le dernier tome du cycle d'une véritable seconde peau.
Mais à force de vous livrer mes coups de cœur, j'en oublierais presque la politesse la plus élémentaire. Et vous, quels sont les bouquins qui vous ont fait vibrer et vous envoler loin dans les méandres de l'imaginaire ?
Bonne lecture, bonne évasion aux côté de Roland, Jack, Eddie et Susannah (et de tous les autres), prenez bien soin de vous et de vos proches et surtout restez chez vous !